Publié le 22 septembre 2021

InSight observe ses deux plus gros tremblements de terre martiens

Opéré depuis le CNES à Toulouse, le sismomètre SEIS a enregistré, le 25 août dernier, deux séismes de magnitude 4,1 et 4,2, soit une énergie 5 fois supérieure à celle du précédent record de la mission, un séisme de magnitude 3,7.

Cette illustration montre le vaisseau spatial InSight de la NASA avec ses instruments déployés sur la surface martienne.
Crédits : NASA/JPL-Caltech

Grâce à ses récentes activités de nettoyage d’un des panneaux solaires, l'atterrisseur de la NASA a dégagé suffisamment de poussière de sa surface pour que son sismomètre, l’instrument français SEIS, reste allumé tout l'été, ce qui a permis aux scientifiques d'étudier les deux plus gros tremblements de terre jusqu’alors observés sur Mars.

La mission, qui a marqué son 1000ème jour martien (ou sol) sur la planète rouge le 18 septembre, analyse les ondes sismiques afin d’étudier l'intérieur de Mars.
Lorsque les ondes sismiques traversent la croûte, le manteau et le noyau d’une planète, elles sont modifiées, ce qui permet aux scientifiques d'étudier les profondeurs de la planète. Ce qu'ils apprennent permet de mieux comprendre la façon dont tous les milieux rocheux se forment, y compris la Terre et sa Lune.

Les tremblements de terre n’auraient pas pu être détectés si les équipes opérationnelles de la mission n'étaient pas intervenues plus tôt dans l'année, lorsque Elysium Planitia, où InSight s'est posé en novembre 2018, a commencé à s'éloigner du Soleil. La baisse des températures a obligé l’atterrisseur inSight à compter davantage sur ses réchauffeurs pour maintenir une température suffisamment haute pour fonctionner. Cette conjoncture, associée à l'accumulation de poussière sur les panneaux solaires d'InSight, a réduit les niveaux de puissance de l'atterrisseur, obligeant la mission à économiser l'énergie en éteignant temporairement certains instruments.

L'équipe a cependant réussi à garder le sismomètre allumé en adoptant une approche contre-intuitive : elle a utilisé le bras robotique d'InSight pour déposer du sable près d'un panneau solaire en misant sur le fait que, lorsque les rafales de vent le porteraient sur un panneau, les granules balaient une partie de la poussière. Le plan a fonctionné, et au cours de plusieurs activités de dépoussiérage, l'équipe a vu les niveaux de puissance rester assez stables. Maintenant que Mars s'approche à nouveau du Soleil, la puissance commence à augmenter à nouveau.

Le bras robotique d'InSight aide à enlever la poussière des panneaux solaires.
Crédits : NASA/JPL-Caltech

"Si nous n'avions pas agi rapidement au début de l'année, nous aurions pu passer à côté d'une grande expérience scientifique, a déclaré le chercheur principal d'InSight, Bruce Banerdt, du Jet Propulsion Laboratory de la NASA en Californie du Sud, qui dirige la mission. Même après plus de deux ans, Mars semble nous avoir donné quelque chose de nouveau avec ces deux tremblements de terre, qui ont des caractéristiques uniques".

Le tremblement de terre le plus important s'est produit à environ 8 500 kilomètres d'InSight - la secousse la plus éloignée détectée jusqu'à présent. Les scientifiques s'efforcent de déterminer la source et la direction des ondes, mais ils savent déjà que la secousse ne provient pas de l'endroit où InSight a détecté la quasi-totalité de ses précédents gros tremblements de terre : Cerberus Fossae (une région située à environ 1 609 kilomètres de là, et particulièrement active sur le plan volcanique). Une possibilité qui intéresse particulièrement les scientifiques est que ce séisme proviendrait de Valles Marineris, le système de canyons très long qui balaie l'équateur martien. Le centre approximatif de ce système de canyons se trouve à 9 700 kilomètres d'InSight, de l’autre côté de la planète.

À la surprise des scientifiques, les tremblements de terre étaient également de types différents. Le séisme de magnitude 4,2 était dominé par des vibrations lentes et de basses fréquences, tandis que le séisme de magnitude 4,1 présentait des vibrations rapides et de hautes fréquences. Ce tremblement de terre à haute fréquence était également beaucoup plus proche de l'atterrisseur, à seulement 925 kilomètres. C'est une bonne nouvelle pour les sismologues : les différents types d'ondes sismiques et les différentes distances fournissent davantage d'informations sur la structure interne de la planète. Cet été, les scientifiques de la mission ont utilisé les données des précédents tremblements de terre pour déterminer la profondeur et l'épaisseur de la croûte et du manteau de la planète, ainsi que la taille de son noyau en fusion.

Malgré leurs différences, les deux derniers tremblements de terre ont un point commun autre que leur taille : ils se sont produits pendant la journée, le moment le plus venteux - et, pour un sismomètre, le plus bruyant (bruité ?) - sur Mars. Le sismomètre d'InSight détecte généralement les séismes martiens la nuit, lorsque la planète se refroidit et que les vents sont faibles. Mais les signaux de ces tremblements de terre étaient suffisamment importants pour s'élever au-dessus de tout bruit causé par le vent.

Pour l'avenir, l'équipe de la mission étudie la possibilité d'effectuer d'autres activités de nettoyage de la poussière après la conjonction solaire de Mars en octobre (lorsque la Terre et Mars se trouvent de part et d'autre du Soleil). Comme les radiations du Soleil peuvent affecter les signaux radio, l'équipe cessera d'envoyer des commandes à l'atterrisseur pendant la conjonction solaire, mais le sismomètre continuera d'écouter les tremblements de terre en renverra les données sur Terre lorsque le contact aura été rétabli.