Publié le 21 juin 2024

Montée des niveaux d’eau des grands lacs d’Afrique de l’est : une observation relevée grâce aux satellites altimétriques

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© LOPEZ-GARCIA José María / CNRS Images

Publié le 28 mars 2024

Les changements majeurs de niveaux d’eau des grands lacs d'Afrique de l'Est constituent un immense défi environnemental dans la région. Par exemple, en 2020, l'élévation du niveau du lac Victoria a entraîné le déplacement des populations locales, l'inondation des terres environnantes et une panne d'électricité régionale en Ouganda. Autour du lac Tanganyika c’est plus de 300 000 personnes qui, en 2021, ont été affectées par les inondations, notamment en République démocratique du Congo et au Burundi.

Plus précisément, les mesures altimétriques montrent que depuis 2019-2020, la plupart des grands lacs d'Afrique de l'Est connaissent une augmentation significative de leur niveau d'eau par rapport à leur niveau moyen au cours des dernières décennies. La base de données Hydroweb (1) fournit ces mesures altimétriques (hauteurs et surfaces d’eau) pour des milliers de lacs et de rivières à travers le monde à partir de données satellitaires. A cet égard, une équipe du LEGOS (unité mixte de recherche dont le CNES, l’IRD, l’université Toulouse 3 et le CNRS sont co-tutelles) vient de publier une étude sur ces inondations autour du lac Tanganyika en s’appuyant sur les données du site Hydroweb et d’autres données d’observation de la Terre (2). Et les résultats sont alarmants.

Pour les quatre plus grands lacs de cette région (Malawi, Tanganyika, Turkana et Victoria), les niveaux d'eau en janvier et en février 2024 sont les plus élevés jamais enregistrés depuis 1992. Sur les lacs Tanganyika et Victoria, par exemple, les niveaux en 2024 sont, en février, déjà supérieurs aux maximum enregistrés lors des années records (2019/2020) sur la période 1992–2023, alors même que les maximums sont attendus fin mai début juin pour ces deux lacs. Quant au lac Turkana, les niveaux d'eau de janvier 2024 sont supérieurs de 0,7 m aux valeurs de janvier 2023 (l’année record sur la période 1992–2023), et les niveaux d'eau de février 2024 sont supérieurs de 0,8 m aux valeurs de février 2023. Les maximums pour ce lac étant attendus en novembre.

Dans le domaine hydrologique, cet exemple relevé en Afrique de l’Est témoigne de l’importance des satellites dans l’évaluation du débit des fleuves et, en filigrane, dans la mesure des conséquences du dérèglement climatique. De manière générale, les satellites d’observation de la Terre scrutent avec une grande précision l’évolution de notre planète, soumise au réchauffement climatique. Le CNES contribue fortement aux programmes européens et coopère à l’échelle internationale dans la genèse et le développement de nouvelles missions qui devront répondre aux enjeux climatiques des années à venir. A ce titre, le CNES et la France sont à la pointe de la recherche sur le climat et permettent à l'ensemble de l'industrie spatiale de jouer un rôle de premier plan dans le programme européen Copernicus, en préparant la prochaine génération de satellites de surveillance opérationnelle de l’environnement, la famille des « Sentinels ».

Le CNES compte en son sein des filières d’excellence telles que l’imagerie avec SPOT/Pléiades et bientôt CO3D, le suivi atmosphérique avec IASI/IASI NG, l’altimétrie avec les satellites Jason, SARAL, CFOSAT, l’hydrologie, dont le suivi des ressources d’eau potable avec SWOT, l’analyse du rôle des aérosols dans l’évolution du climat avec la suite du programme CALIPSO, ainsi que Trishna, mission dédiée à l’agriculture et aux eaux côtières et continentales.

A cet égard, l’ouverture de la plateforme Hydroweb (hydroweb.next.theia-land.fr), grâce au programme préparatoire SWOT aval et au développement de l’infrastructure de données et de services DataTerra/THEIA, ouvrira d’importantes perspectives dans le domaine de l’observation de la Terre. En effet, son ambition est de centraliser un maximum de données satellitaires, de modèles et de données in situ pour les experts en hydrologie.

 

(1) Cette base de données contient et délivre les séries temporelles des niveaux d'eau des grands lacs, réservoirs et rivières produites par le LEGOS (Laboratoire d'Etudes en Géophysique et Océanographie Spatiales) et le CLS (Collecte Localisation par Satellite). Les séries temporelles sont obtenues après corrections (géophysiques, environnementales et instrumentales) des mesures altimétriques enregistrées par les capteurs radar (Topex/Poséidon, ERS-2, GFO, Jason-1, Envisat, Jason-2, Jason-3, CryoSat-2, Saral/Altika, Sentinelle-3A et Sentinelle-3B). Les cycles orbitaux de chaque mission varient de 10 à 35 jours et déterminent la résolution temporelle des mesures sur un lac ou une rivière donné(e).

(2) Gbetkom P., Cretaux J-F., Biancamaria S, Blazquez A, Gosset M, Paris A, Tchilibou M, Gal L, Kitambo B, Jucá Oliveira R-A. 2024, Lake Tanganyika basin water storage variations from 2003-2021 for water balance and flood monitoring. Remote Sensing Applications: Society and Environment, 34, 101182, https://doi.org/10.1016/j.rsase.2024.101182

 

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