France - Le Grand Lyon : les dynamiques des espaces périurbains de l’aire urbaine lyonnaise

Avec 2 millions d'habitants, le Grand Lyon, c’est-à-dire l’aire urbaine lyonnaise, vient par sa taille au 2em rang après Paris. Se caractérisant par son fort dynamisme démographique, économique et urbain, elle intègre non seulement des communes appartenant au département du Rhône, mais également à l’Isère, à l’Ain ou à la Loire. Aux frontières de l’aire urbaine proprement dite se trouvent des espaces périurbains, eux même en forte croissance démographique et entretenant des liens fonctionnels à la fois avec la métropole ; mais également entre eux grâce aux polarités secondaires émergeantes. Au total, tous ces espaces participent de la dynamique métropolitaine lyonnaise.

 

Légende de l’image

 

Cette image de la région de Lyon a été prise par le satellite Sentinel 2A le 7 avril 2020. Il s’agit d’une image en couleurs naturelles de résolution native à 10m.

Ci-contre, la même image satelitte issue de Sentinel-2A, présente quelques repères géographiques de la région.

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Repères géographiques

 

 

 

Présentation de l’image globale

Les espaces périurbains de l’aire urbaine lyonnaise

L’aire urbaine lyonnaise, avec 2 millions d'habitants, intègre non seulement des communes appartenant au département du Rhône mais également des communes appartenant à l’Isère, à l’Ain, à la Loire. Aux frontières de l’aire urbaine se trouvent des espaces périurbains, en forte croissance démographique, entretenant des liens fonctionnels avec la métropole mais également entre eux, grâce aux polarités secondaires émergeantes. Comment ces espaces participent-ils de la dynamique métropolitaine lyonnaise ?

L’agglomération lyonnaise : une aire urbaine en plein essor

Les communes périurbaines se caractérisent, d’après le Zonage en Aires Urbaines de l’INSEE, comme des espaces où au moins 40 % des actifs travaillent dans une commune appartenant à un pôle urbain. Suite à la diffusion de l’équipement automobile dans les années 1970, des ménages ont pu habiter plus loin de leur lieu de travail et accéder non seulement à un logement plus spacieux mais également à la propriété foncière. Ces migrations résidentielles et les mobilités qu’elles impliquent sont à l’origine de paysages périurbains divers, à la fois en fonction de la distance à la ville mais également par les fonctions qu’ils remplissent en termes d’activités économiques, de réseaux, de logistique comme des types d’habitats qu’ils portent.

La tache urbaine présente sur l’image satellite se compose de la ville-centre, de la banlieue l’entourant et des communes périurbaines de la première couronne. Au-delà, les paysages de campagne, comme en atteste la part tenue par les espaces forestiers et les champs, l’emportent avec des communes périurbaines regroupant le plus souvent moins de 2000 habitants. Ces campagnes placées dans l’orbite d’une ville tiennent une place démographique importante puisque près de 30% des habitants de l’aire urbaine y résident. Le mouvement de périurbanisation entamé en 1968 est toujours actif et inclut désormais des espaces éloignés de la ville centre.

L’aire urbaine lyonnaise enregistre une forte croissance démographique (plus de 1 %/an entre 2007 et 2012), marqueur d’une attractivité croissante. La ville-centre se caractérise par une forte densité de population (10.400 hab/km2, contre 364 pour l’ensemble de l’aire urbaine), résultat d’une croissance de + 0,7% entre 2007 et 2012 pour l’ensemble du pôle urbain alors que les communes périurbaines affichent des taux de croissance de + 1,2 à + 1,3%/an, résultat d’un étalement urbain en doigt de gants suivant les axes de communication. Le rayon de l’aire urbaine lyonnaise au départ de la ville-centre avoisine les 60 kilomètres.

Les activités industrielles (Renault Truck, Bio Mérieux, Sanofi Pasteur) et de services (finances et banques, industries du jeux vidéo, services aux entreprises) ont conduit à un desserrement des activités industrielles et logistiques depuis quarante ans en adéquation avec les disponibilités foncières et leur coût. De même, la proximité de l’agglomération avec les espaces naturels participe à l’engouement pour la qualité de vie dans ces espaces périurbains plus ou moins éloignés, y compris au prix de mobilités proches de 1h pour se rendre sur son lieu de travail.

Les facettes du périurbain lyonnais

En fonction de leur éloignement à la ville-centre, ces espaces présentent des profils paysagers divers, résultat d’une hybridation de l’urbain et du rural, en discontinuité morphologique avec l’agglomération mais dans sa continuité fonctionnelle.

Comme le montre très bien l’image, la dissymétrie topographique opposant un Ouest des collines à un Est des plaines de part et d’autre du couloir rhodanien se retrouve dans la répartition socio-spatiale des habitants de l’aire urbaine : les Monts d’or, comme les Monts du Lyonnais, accueillent des populations plus aisées que celles présentes dans la plaine lyonnaise : le Sud ou l’Est de la métropole étant plus accessibles dans le cadre d’une accession à la propriété.

Les ménages disposant d’un budget inférieur à 250.000 € sont contraints de s’éloigner du cœur de l’agglomération, de se positionner sur des secteurs mal desservis par les transports en commun ou des communes de banlieue souffrant d’un déficit d’image ou bien encore de se diriger vers les franges de l’aire urbaine (Loire, Beaujolais, Ain, Isère). L’accession à la propriété d’une maison individuelle motive les déplacements de familles de classes moyennes salariées inscrits dans un parcours d’ascension sociale : les espaces périurbains concentrant l’essentiel des flux migratoires résidentielles de l’aire urbaine.

Pour autant, les espaces périurbains, grâce aux petits collectifs - y compris locatifs - dont ils sont porteurs, sont loin d’être monolithiques : ils accueillent à la fois des ménages plus modestes comme des cadres ainsi que des natifs, résidant dans des structures villageoises anciennes réhabilitées ou dans des ensembles pavillonnaires plus ou moins récents. Loin d’être des villages dortoirs, les bourgs constituent des polarités secondaires grâce aux structures économiques présentes (économie résidentielle, tissu industriel de PME dans le domaine de l’agro-alimentaire, des biotechnologies, du numérique, de l’éco-construction, emplois dans les exploitations agricoles maraichères) à l’origine d’une véritable diversification des emplois locaux.

Des territoires au cœur des mobilités

Les espaces périurbains concentrent les réseaux de transport de dimension métropolitaine (aéroport Saint-Exupéry ; périphérique de Lyon, Autoroutes A6, A7, A42, A43, A46, A47, A89 ; réseau TGV et TER) permettant de relier la métropole à une échelle régionale, nationale ou européenne. Ces équipements ne remplissent pas seulement une fonction de transit mais maillent la métropole et facilitent les déplacements au sein de celle-ci.

Le territoire de la métropole est également desservi par un réseau de transports en commun (TLC) s’étendant sur l’ensemble du territoire métropolitain et faisant le lien avec le mode aérien, via le réseau de tramway Rhône Express Rhône entre la gare de Lyon Part Dieu et l’aéroport Lyon-Saint Exupéry. Le projet autoroutier (A45), abandonné par le gouvernement en 2018, a suscité une forte opposition dans les espaces périurbains devant être traversés par celui-ci. Une intense mobilisation a consisté en l’organisation d’évènements festifs pour rendre visible leurs revendications et alerter les habitants du cœur de la métropole des dangers d’une artificialisation des sols dans le cadre de cet aménagement.

Au-delà de l’emprise et la présence, dans les espaces périurbains, des principaux réseaux de transport, ces espaces sont le lieu d’intenses liens entre la métropole et les espaces ruraux mais également entre les espaces périurbains eux-mêmes et avec le cœur de l’agglomération. Toutefois, la dissociation du périmètre de la métropole avec celui de l’aire urbaine limite l’action des politiques publiques de transport en commun. Le recours à l’automobile apparaît toujours dans les communes périurbaines les plus périphériques de l’aire urbaine comme le seul moyen de déplacement au sein de ces espaces comme avec le cœur de la métropole.

L’aménagement de parc-relais dans la ville-centre comme la limitation de la vitesse à 70 km/h sur le périphérique lyonnais ou bien encore la transformation de certaines sections de l’autoroute A7 en boulevard urbain à l’horizon 2021 ne peuvent suffire à réduire les flux automobiles au cœur de l’agglomération et la pollution adjacente. Une véritable réflexion à l’échelle de l’aire urbaine, en relation avec les aires urbaines adjacentes, est indispensable pour satisfaire les déplacements diurnes comme nocturnes des populations non motorisées.

La faible densité des espaces et la distance entre les équipements exigent des habitants des espaces périurbains adaptation et mobilisation pour passer d’un lieu à l’autre et rendent compliqués la mise en œuvre de moyens de transports collectifs, en dehors de quelques expériences de transport à la demande menées. Pourtant, l’émergence de pôles d’emplois secondaires exige, pour réfléchir à la gestion des déplacements à l’échelle de l’aire urbaine, de s’affranchir du modèle classique centre / périphérie et de miser sur les bassins de vie qui animent les espaces périurbains.

En conclusion, si le mouvement des gilets jaunes a mis l’accent sur les dépenses contraintes induites par une localisation résidentielle périurbaine pour des ménages bi-motorisés, il est nécessaire d’aller au-delà d’une analyse binaire centre-périphérie. Loin d’être à l’écart des dynamiques métropolitaines, les espaces périurbains participent à l’attractivité métropolitaine dans le cadre d’une relation multiscalaire complexe.

Relevant à la fois de logiques urbaines et rurales en tant qu’espace hybride, partagé entre villes et campagnes, les espaces périurbains s’inscrivent à la fois dans une logique métropolitaine dans les liens qu’ils entretiennent (notamment par les mobilités de leurs actifs) avec l’agglomération mais également par l’intensité des flux les parcourant. Les polarités secondaires qu’ils abritent permettent de suppléer aux déplacements autres que ceux liés au travail par l’exploitation des ressources locales en termes de commerce comme d’accès à des activités de loisirs. Elles sont le support de modes d’habiter autonomes portés par des politiques de développement local devant être encouragées afin de les renforcer.

 

Zooms d’étude

 



La Vallée du Gier : un corridor urbain entre Lyon et St Etienne

La Vallée du Gier est un axe majeur de l’étalement urbain avec l’A47, voie rapide saturée permettant de relier la métropole lyonnaise à Saint-Étienne. Plus de 70.000 voitures empruntent chaque jour cet axe gratuit. Le projet d’un dédoublement autoroutier (A45), à 5-10 kms plus au nord de l’image satellite, a émergé assez vite après la mise en service de l’A47 en 1983 et a été précisé au milieu des années 2000. Il visait à connecter l’A72 en direction de Clermont-Ferrand au sud-ouest lyonnais, tout en délestant l’A47 de son trafic intense.

Des collectifs contre ce projet se sont vivement mobilisés, dénonçant la légitimité du projet, jusqu’à la décision de sa suspension par la ministre des Transports à la fin 2018. Ce conflit d’usage (Dietrich et Bourgeois, 2020) autour d’un GP2I (Grand Projet Inutile Imposé) s’explique par les fortes mutations spatiales qu’un tel équipement aurait engendrées : artificialisation des sols et renforcement du corridor de développement de la nappe urbaine autour ce nouvel axe.

Le corridor urbain autour de l’A47, entre la métropole lyonnaise et Saint-Étienne, est presque continu à l’exception des communes périurbaines de Tartaras et de Trèves, situées à l’est de Rive-de-Gier. Les lotissements récents, situés en périphérie des villages et à proximité d’un échangeur de l’A47, témoignent des dynamiques démographiques à l’œuvre dans ces espaces. Les mobilités pendulaires, avec le développement de zones résidentielles, sont responsables du recul des terres arables jouant pourtant un rôle central dans l’alimentation des habitants de la métropole lyonnaise.

 

 



Les Dombes : un système rural et agricole intégré

Les Dombes, surnommées « le Pays aux Milles étangs », compte plus de 1.000 étangs aménagés à partir du XIème siècle par des ordres monastiques pour mettre en valeur des marécages en permettant de drainer les cultures et développer la pisciculture. Ce paysage anthropisé, fondé sur complexe réseau de canaux alimentant les étangs, abrite une faune et une flore exceptionnelle, valorisé par le Parc des Oiseaux de Villars-Les-Dombes, situé à l’extrémité nord-ouest de l’image satellite.

Les communes des Dombes appartiennent à l’aire urbaine lyonnaise en tant que communes périurbaines situées dans l’Ain. Nombreux y vivent des navetteurs travaillant dans la ville-centre de Lyon et empruntant l’A42, rejoints le week-end par des Lyonnais, résidents secondaires. Les pôles périurbains de Villars-Les-Dombes et de Meximieux, en tant que polarités secondaires, assurent aux résidents leurs besoins quotidiens et l’accès à des services intermédiaires leur permettant de réduire leur dépendance au cœur de la métropole.  

 

 



Le sud-est : l’avancée de la nappe urbaine sur les espaces agricoles

Le sud-est de Lyon présente l’avancée de la nappe urbaine sur les espaces agricoles en suivant les axes de voies rapides. La commune de Genas située à l’Est du parc des expositions adjacent à l’aéroport de Bron appartient au pôle urbain lyonnais alors que les communes de Saint-Bonnet et Saint-Laurent-de-Mure font partie de la couronne périurbaine.

L’aéroport de Bron – nettement visible sur l’image satellite - est un aéroport d’affaires depuis 1975, date du transfert du trafic aérien à l’aéroport Saint-Exupéry, situé à 25 km de Lyon-centre. La nécessité impérieuse de disposer de davantage de place pour recevoir des long-courriers explique la réalisation de cet aménagement.

Entre cet équipement et le pôle urbain de Lyon, l’habitat et les aménagements se densifient comme en atteste la croissance démographique des communes situées le long des axes autoroutiers et le développement de zones d’activités. Les mobilités dans ces espaces sont le plus souvent automobiles à défaut de densités suffisamment fortes pour rentabiliser un transport collectif.

 

 



Un Sud en recomposition et le « Couloir de la chimie »

Au sud de l’agglomération lyonnaise, dans le « Couloir de la chimie », s’échelonnent plusieurs établissements de chimie et de pétrochimie le long du canal de dérivation du Rhône et d’axes routiers et ferroviaires reliant le sud de la France et la Méditerranée. Ces zones industrielles, avec de nombreuses usines classées Seveso, côtoient des zones urbanisées rassemblant plus de 400.000 personnes.

Un différentiel dans l’habitat existe entre la rive gauche et la rive droite du fleuve. La rive droite accueille des populations plus aisées que celles de la rive gauche. Cela tient à des aménités environnementales : à l’ouest, les quartiers d’habitat sont en hauteur et surtout ne sont pas soumis aux vents d’Ouest ramenant vers l’Est les fumées de l’industrie chimique. Les communes de Vénissieux, Feyzin et Solaize abritent surtout des ouvriers vivant dans des grands ensembles comme dans de l’habitat individuel.

Le sud de l’aire urbaine de Lyon témoigne du déplacement d’activités du centre de l’agglomération vers la périphérie. L’aménagement de l’écoquartier de la Confluence, a nécessité de relocaliser des équipements en périphérie. La prison Saint-Paul comme le marché de gros ont été installés à Corbas, commune située au NE de l’image satellite, le long de l’autoroute A46 de contournement de l’aire urbaine. L’importance tenue par les bâtiments industriels et les entrepôts imbriqués dans des espaces résidentiels et agricoles renseigne sur les multiples fonctions tenues par ces espaces dans le cadre de l’avancée du front d’urbanisation.

 

D’autres ressources

Sur le site Géoimage du CNES

Marie-Christine  Doceu : Lyon : la métropolisation d’une ville-carrefour.


Sur le site Géoconfluences de l’ENS de Lyon du même auteur

Didier-Fèvre Catherine, 2019. « Aux frontières de la métropole lyonnaise : des espaces périurbains à géométrie variable. » Géoconfluences.

Lionel Rougé, 2018. « Notion à la Une : périurbanisation ». Géoconfluences.

Autres ressources

Charmes Éric, 2019. La revanche des villages. Essai sur la France périurbaine. Paris, Le Seuil, 112 p.

Dietrich Judicaëlle et Bourgeois Marc, 2020 « Un territoire face à des sols convoités : Vulnérabilité foncière et projet d’autoroute entre Lyon et Saint-Etienne » in Terra Mater, Sols convoités.  Presses Universitaires du Septentrion, À paraître.

Descroux Thibaud, 2016. Enquête déplacements 2015 de l’aire métropolitaine lyonnaise.  

Urbalyon, 2019. La voiture dans l’aire métropolitaine lyonnaise. 

Thimonier-Rouzet Emmanuel, 2015. Lexique métropolitain. Les territoires lyonnais. Agences d’urbanisme Lyon – Saint Étienne, 2015

Contributeur

Catherine Didier-Fevre, docteure en géographie, chercheuse associée à l’UMR 5600 EVS, professeure de géographie en CPGE littéraires, Lycée Sainte-Marie Lyon.