Tchad – Le Tibesti, le plus haut des massifs montagneux sahariens en pays Toubou et àla frontière de la Libye

La Tibesti est l’un des deux plus principaux massifs montagneux du Sahara, avec le Hoggar algérien. Situé pour sa plus grande partie au nord du Tchad, avec une petite extension en Libye, le Tibesti possède plusieurs sommets à plus de 3 000 mètres, dont l’Emi Koussi (3 415 m) qui est le point culminant du Sahara. Ce massif montagneux est au cœur du pays Toubou, l’un des trois grands peuples nomades du Sahara, avec les Maures et les Touaregs. Le Tibesti se caractérise aussi par son isolement et par les nombreuses crises politiques qu’il a connues depuis l’indépendance du Tchad, la Libye ayant longtemps revendiqué sa souveraineté sur la bande frontalière d’Aozou.

 

Légende de l’image

 

Cette image du massif du Tibesti, massif montagneux du Sahara central, a été prise par le satellite Sentinel 2A le 14 mars 2020. Il s’agit d’une image en couleurs naturelles de résolution native à 10m.

Ci-contre, la même image satelitte issue de Sentinel-2A, présente quelques repères géographiques de la région.

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Repère géogrpahique

 

 

 

Présentation de l’image globale

Tibesti : le massif le plus élevé du Sahara … et le plus isolé

Un imposant massif volcanique

 

Le Tibesti est l’un des deux plus grands massifs montagneux du Sahara et il est le plus élevé. Dans le sud algérien, le Hoggar ne dépasse pas les 3 000 mètres (Tahat : 2 908 m) alors que le Tibesti compte plusieurs sommets au-dessus de cette altitude : l’Emi Koussi, point culminant du Sahara avec 3 415 mètres, le Toussidé à 3 265 mètres, bien visible sur l’image avec ses coulées de lave noires orientées vers l’ouest (et, dans le même massif, l’Ehi Timi à 3012 mètres), le Tarso Taho (3 225 mètres) et le Tarso Emissi à 3 150 mètres. A l’est de l’image, le Tarso Tieroko est lui aussi plus élevé que le Tahat avec 2 925 mètres.

Comme le Hoggar, le Tibesti est un massif volcanique ; n’étant pas situés sur une bordure de plaque tectonique, tous deux sont des « points chauds ». Ces volcans ont leur origine vers la fin de l’ère tertiaire et ils ont connu une activité effusive qui s’est terminée il y a quelques milliers d’années.

Si le volcanisme du Hoggar est totalement éteint, il n’en va cependant pas de même pour le Tibesti où une activité résiduelle perdure sous forme de solfatares, de fumées et de sources chaudes. Le Toussidé est l’un de ces volcans encore faiblement actifs. Un autre lieu d’activité se trouve au piémont occidental du Tarso Voon avec les sources chaudes de Soborom.

Contrairement à l’Atakor – le massif central du Hoggar – le socle cristallin n’affleure que peu au Tibesti et « la plus grande partie du massif est occupée par de hauts plateaux gréseux, tantôt découpés en une infinité de tours, de piliers et d’escarpements ruiniformes, tantôt formant une surface continue, rugueuse et noire comme une hamada. Les éruptions volcaniques l’ont recouverte d’un entassement de tufs et de laves qui sur plusieurs points dépasse 3 000 m. » (Capot-Rey, 1953).

Les édifices volcaniques se terminent fréquemment par de vastes caldeiras, dues à l’effondrement du toit de leur chambre magmatique, comme celle du Tarso Toon bien visible sur l’image. La plus impressionnante de toutes, au Tibesti, est celle de l’Emi Koussi, qui se trouve au sud du massif (hors image). Sa caldeira s’étend sur une circonférence de trente-cinq kilomètres au sommet du volcan, soit une cuvette de 10 000 hectares – l’équivalent de Paris intra-muros ! – surplombée par des falaises de 300 à 400 mètres de haut sur tout son pourtour. Au centre de cette caldeira se trouve un cratère de 300 mètres de profondeur dont le fond est occupé par une couche de natron, un dépôt salé évaporitique de couleur blanche. Le Trou au natron, que l’on peut repérer sur l’image avec sa couleur blanche, juste au sud-est du Toussidé, est encore beaucoup plus profond…

 

 

Source : Courbon, P. 2010. Un gouffre volcanique exceptionnel le Doon Kinnimi (Tchad). XYZ, septembre 2010, 124, p. 57-63 (http://www.aftopo.org/)

 

Le Tibesti : un massif montagneux isolé

Le Tibesti se caractérise aussi par son isolement. Situé au nord du Tchad pour sa plus grande partie, avec son extrémité nord-est en Libye, il constitue la région du Sahara la plus difficile d’accès.

Envoyé en garnison au poste d’Aozou à la fin de 1939, Théodore Monod notait dans son livre L’émeraude des Garamantes qu’il lui avait fallu plusieurs mois pour rejoindre son poste : « Parti de Dakar le 24 septembre, j’arrivais dans le dernier petit poste du Tibesti, près de la frontière libyenne, le 21 décembre », après une traversée de cinquante et un jours à dos de chameau à partir de Moussoro, au nord de N’Djamena. En raison de son éloignement de la capitale et du manque d’aéroport dans le nord du pays, le Tibesti reste aujourd’hui encore très difficile d’accès.

Guère plus de 800 touristes sont passé à Faya-Largeau, la principale ville au sud du massif, entre 2000 et 2012. Pourtant, entre 2012 et 2014, l’utilisation de son aéroport militaire a permis un timide et court développement du tourisme dans le Tibesti et l’Ennedi, par l’entremise du voyagiste Point Afrique et avec le soutien actif du gouvernement tchadien. Mais cette ouverture touristique n’a pas pu être poursuivie et le Tibesti est, depuis, retombé dans son isolement.

Le Tibesti, au cœur d’un pays Toubou transfrontalier

Trois grands peuples nomades occupent chacun une immense aire géographique au Sahara : les Maures à l’ouest, les Touaregs au centre et les Toubous vers l’est. Leurs territoires sont séparés par des contrées dépourvues d’eau et de végétation et qui ont été longtemps infranchissables : le Tanezrouft entre le pays des Maures et celui des Touaregs ; le Ténéré entre ces derniers et les Toubous. Chacun de ces immenses territoires couvre une étendue qui touche à la fois aux rives septentrionale et méridionale du désert, ce qui a longtemps permis à chacun de ces trois grands peuples caravaniers de contrôler des routes transsahariennes entre les oasis, au nord et au sud, où s’effectuaient les échanges marchands avec les sédentaires. Ce grand commerce caravanier a duré jusque dans les années 1950.

Parmi ces trois peuples, les Maures et les Touaregs sont berbères, même si les Maures ont été arabisés au XVIIe siècle. L’origine des Toubous est quant à elle inconnue. Il faut se souvenir, bien sûr, que c’est dans le sud du pays Toubou, au Tchad actuellement, qu’ont été découverts par l’équipe du préhistorien Michel Brunet deux des plus anciens hominidés connus : Abel en 1995 (3 millions d’années) et Toumaï en 2002 (7 millions d’années). Si l’on recherche l’origine des Toubous à une époque plus récente, l’ethnologue Catherine Baroin (2003) évoque l’hypothèse des « Ethiopiens troglodytes mentionnés par Hérodote dès le Ve siècle avant notre ère ». Mais ce n’est qu’une hypothèse…

Les aires de parcours de ces trois grands peuples – dont l’essentiel de l’étendue relevait du Sahara français après la Seconde Guerre mondiale, lorsque le Fezzan libyen s’y est trouvé intégré – ont été fragmentées à l’époque des indépendances entre les territoires de différents États modernes. Ainsi, le pays toubou se déploie sur quatre États sahariens contemporains de la région : Tchad, Libye, Niger et Soudan. Il englobe en effet tout le nord du Tchad, soit les régions du Borkou, de l’Ennedi et du Tibesti, le sud de la Libye jusqu’à Koufra et les premières oasis du Fezzan, les régions du Manga, du Djado et du Kaouar au Niger et, enfin, la bordure nord-ouest du Soudan. Les Toubous du nord sont appelés Teda et ceux du sud Daza, parfois aussi Goranes.

Par sa position, le Tibesti fait nettement figure de bastion central du pays toubou. Cette région saharienne très aride malgré ses montagnes est certainement l’une des plus pauvres du Sahara. Dans L’Emeraude des Garamantes, Théodore Monod faisait ce constat éloquent : « On comprend ici que l’occupation cardinale de gens qui ont dans la liste de leurs aliments un mot pour "farine de bois de palmier" soit la lutte contre l’inanition ». Les Toubous, peu nombreux au Tibesti, vivent chichement de l’élevage de chèvres et de dromadaires et de la production de quelques palmeraies comme Bardaï. L’activité d’orpaillage artisanal est devenue importante aussi dans la région de l’Emi Koussi.

Un espace de conquête tardive et difficile

Le premier Européen à avoir exploré le Tibesti a été l’Allemand Gustav Nachtigal en 1869 et aucun autre occidental ne visitera ce massif pendant les quarante années qui suivront. Les Français s’installent pour la première fois au Tibesti en 1914 puis ils y reviennent en 1929 au terme d’une conquête difficile. Les Toubous, dénués de toute organisation hiérarchique, sont alors perçus comme « pillards sans scrupule, querelleurs, orgueilleux et susceptibles à l’extrême » (Baroin, 2003).

On ne peut que constater la spectaculaire différence de regard qui a été portée par les Français sur les Toubous et les Touaregs pendant la période coloniale. Les premiers ont pendant longtemps suscité la méfiance et le rejet alors que les seconds ont été beaucoup plus valorisés, au point de devenir les « hommes bleus » du désert, sortes de chevaliers des temps modernes.

Pour Catherine Baroin, l’une des explications à cette différence de traitement tient au fait que les Touaregs ont été connus des Européens beaucoup plus tôt que les Toubous et que de nombreux récits de voyage ou ouvrages scientifiques ont dévoilé de multiples traits de leur culture (Barth, Duveyrier, Foucauld, Lhote).

Pour les Toubous du Tibesti, il faudra attendre pour les connaître les travaux de l’ethnologue Charles Le Cœur au début des années 1930. Une autre explication est d’ordre militaire : à l’organisation centralisée des Touaregs dans leurs différentes confédérations s’opposaient l’anarchie et l’individualisme des Toubous qui rendaient le dialogue des plus difficiles avec les officiers français.

Une difficile cohabitation avec la Libye, entre occupation de la «bande d’Aozou» et instrumentalisation des conflits internes aux Toubous

Le Tchad est devenu indépendant en 1960 mais la partie nord du pays, souvent appelée B.E.T – pour Borkou-Ennedi-Tibesti - est restée sous le contrôle de la France jusqu’en 1965. La période de présence française au Tibesti a, au total, été assez courte : 36 ans, de 1929 à 1965.

Dès le départ des militaires français, un mouvement de rébellion s’est organisé contre le régime du président tchadien François Tombalbaye. En 1968, le FROLINAT (Front de libération nationale) est créé et des mutineries éclatent à Bardaï et à Aozou. La France est appelée à l’aide et les militaires français vont être à nouveau présents dans le B.E.T entre 1968 et 1971, au prix de nombreuses altercations violentes avec les Toubous. Le rapprochement du Tchad avec la Libye de Kadhafi pousse la France à se retirer en 1971. Si pendant cette première période de rébellion, les Toubous se sont montrés unis dans leur révolte face au pouvoir de N’Djamena, il ne va pas en être de même par la suite.

Arrivé au pouvoir en 1969, Mouammar Kadhafi se met en effet rapidement à contester le tracé des frontières de son pays, tant à l’ouest avec l’Algérie qu’au sud avec le Tchad. En 1973, ses troupes occupent la «bande d’Aozou » dans le nord du Tibesti, sans que l’État tchadien ne réagisse dans un premier temps.

Le 21 avril 1974, les rebelles des Forces armées du nord (FAN) menés par Hissène Habré et Goukouni Oueddeï enlèvent dans l’oasis de Bardaï l’archéologue française Françoise Claustre, ainsi qu’un coopérant français (Marc Combes) et un médecin allemand (Christoph Staewen qui sera rapidement libéré grâce au paiement d’une rançon par son gouvernement). Le commandant Pierre Galopin, émissaire envoyé par la France pour négocier la libération de François Claustre et de Marc Combes, est exécuté le 4 avril 1975. Marc Combes réussit à s’échapper le 23 mai de la même année. Pierre Claustre, le mari de Françoise, est à son tour enlevé quelques mois plus tard alors qu’il tentait de porter secours à son épouse. Tous deux seront libérés le 31 janvier 1977 après une négociation entre le Premier ministre français Jacques Chirac et le colonel Kadhafi, soutien de Goukouni Oueddeï.  

En effet, les deux chefs toubous se sont séparés et leurs itinéraires respectifs vont désormais refléter des intérêts géopolitiques divergents, en partie instrumentalisés par des forces extérieures à la région, au premier rang desquelles la Libye. Ainsi, les Tedas – les Toubous sahariens – de Goukouni Oueddeï, soutenus par Kadhafi, s’opposent dorénavant aux Dazas – les Toubous sahéliens – d’Hissène Habré.

Goukouni Oueddeï lance une grande offensive dans le nord du Tchad en 1977 avec l’aide de la Libye, ce qui amène en retour l’intervention militaire de la France, à la demande du gouvernement tchadien du général Malloum. Une unité blindée libyenne outrepasse le 22ème parallèle – soit environ la latitude d’Aozou – qui avait été fixé comme limite à ne pas franchir et elle est alors détruite par l’aviation française.

Goukouni Oueddeï s’installe au pouvoir à N’Djamena, la capitale du Tchad, en 1979 dans le cadre d’un gouvernement d’union nationale et en 1980 il signe un accord de défense avec la Libye. En 1983, le retrait de la Libye du Tchad, et donc du Tibesti, est négocié par la France. Dans ce contexte, Goukouni Oueddeï s’enfuit au Cameroun alors qu’Hissène Habré s’installe au pouvoir.

En 1983, Goukouni revient dans le nord du pays avec l’aide de la Libye et ce pays attaque la région au nord d’Abéché en 1986. La France, appelée en renfort, déclenche l’opération Epervier. Bardaï est bombardée par l’aviation libyenne en décembre et Kadhafi tente de réinvestir la bande frontalière d’Aozou en 1987. La Cour Internationale de Justice de La Haye donnera finalement raison au Tchad en 1994 pour la souveraineté sur ce territoire contesté.

En 1990, Idriss Déby, chef d’état-major de l’armée tchadienne, prend le pouvoir et il succède donc à deux Toubous. Une nouvelle rébellion contre le gouvernement central va s’organiser dans le Tibesti entre 1999 et 2002 sous la conduite du ministre de la défense Teda Youssef Togoïmi, jusqu’à ce qu’il soit tué dans un attentat en septembre 2002 à Wour, au nord du Toussidé.

Une marge septentrionale du Tchad sous tension au contact d’une Libye ravagée par la guerre civile

Le Printemps arabe et la chute de Mouammar Kadhafi en octobre 2011 n’ont pas eu d’incidence géopolitique immédiate sur le Tchad. Alors que la Libye sombrait dans une interminable guerre civile, le Tibesti connaissait, entre 2012 et 2014, une période d’un calme relatif. La région n’étant classée qu’en zone orange (« déconseillé sauf raison impérative ») sur les cartes de conseils aux voyageurs du Ministère français des affaires étrangère, une tentative de développement touristique fut menée par le voyagiste Point Afrique avec le soutien actif du gouvernement tchadien.

Alors que le tourisme s’était effondré partout ailleurs au Sahara en raison de l’expansion du risque djihadiste à partir de 2010, les massifs montagneux de l’est – l’Ennedi - et du nord – le Tibesti - du pays étaient curieusement restés les seules régions sahariennes encore accessibles. Cette nouvelle organisation touristique avait été rendue possible par l’utilisation de l’aéroport militaire de Faya-Largeau. Ayant souffert de « l’absence relative de personnel qualifié et francophone d’origine locale » et n’ayant pas suscité d’intérêt chez les Toubous, cette expérience s’est terminée en 2014 (Brachet, Scheele, 2015).

De nouveaux troubles ont eu lieu dans la région du B.E.T en 2019 et 2020. Au début de février 2019 tout d’abord, un convoi d’une cinquantaine de véhicules transportant 250 personnes du groupe rebelle de l’Union des forces de la résistance (UFR), venu du sud de la Libye et qui avait le projet de marcher sur la capitale après une tentative de coup d’Etat en 2018, est arrêté dans la région de l’Ennedi avec l’aide d’avions français de la force Barkhane, dont le siège est à N’Djamena. Au Tibesti, dans la région de Miski, à l’ouest de l’Emi Koussi, des affrontements ont eu lieu entre des orpailleurs artisanaux locaux et les forces gouvernementales avant qu’un accord ne soit signé en novembre 2019.

En raison de son isolement et de sa position frontalière avec la Libye, par l’instabilité politique durable du Tchad longtemps alimentée par l’interventionnisme de Mouammar Kadhafi, par l’insécurité générée par la guerre civile qui ravage la Libye depuis la chute de ce dernier et alimente l’islamisme radical, le Tibesti s’est ainsi continuellement trouvé au centre d’intérêts divergents et d’oppositions violentes depuis l’indépendance du Tchad.

 

Zooms d'étude

 



Bardaï, Zouar et le massif du Toussidé


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Un massif peu peuplé et vidé par les migrations vers le sud


Le Tibesti est un massif montagneux peu peuplé. Selon Robert Capot-Rey (1953), un recensement avait permis en 1949 de dénombrer 9 300 Tedas vivant dans le Tibesti,  pour une population totale de 100 000 Toubous au maximum. En 2018, l’Institut national de la statistique, des études économiques et démographiques du Tchad a recensé 35 000 habitants dans le Tibesti.

A la suite des nombreux troubles que la région du Borkou-Ennedi-Tibesti a connus depuis le départ de l’armée française en 1965, le massif s’est beaucoup vidé de sa population. Ceci pour deux raisons principales : du fait des nombreuses victimes des conflits et de la migration d’un grand nombre de Toubous vers le sud, à N’Djamena, lorsque deux des leurs, Goukouni Oueddeï puis Hissène Habré, s’installèrent au pouvoir (Baroin, 2003).

Un territoire marginal et sous-encadré

Bardaï, au nord-est du massif du Toussidé, et Zouar, au sud, sont deux localités modestes. Situé dans un cirque rocheux au débouché du défilé de l’enneri Bardagué –l’un des oueds les plus importants du Tibesti septentrional – l’oasis de Bardaï est dotée d’une belle palmeraie. En 1935, dans le journal de la Société des Africanistes, Charles Le Cœur l’avait décrite comme « la plus septentrionale des grandes palmeraies de la montagne ». Bardaï est le chef-lieu de la région administrative du Tibesti, créée en 2008. C’est là que Françoise Claustre a été enlevée en 1974.

De moindre importance, Zouar est localisée dans une plaine qui n’est pas très éloignée de la bordure sud-ouest du massif, ce qui confère à cette localité un caractère beaucoup moins montagnard que celui de Bardaï. Zouar est l’une des sous-préfectures du Tibesti.

La ville de quelque importance la plus proche du Tibesti est Faya-Largeau, à 500 kilomètres au sud, qui compte environ 20 000 habitants. Jusqu’à la réforme administrative de 2008, Faya a été la préfecture de l’ancienne région du Borkou-Ennedi-Tibesti.

 

 



Le Toussidé et le Trou au natron


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Le massif du Toussidé, un volcan de premier plan

Entre Zouar et Bardaï, le massif du Toussidé s’impose par son étendue et son altitude (3 265 mètres). Le volcanisme de ce massif a débuté à la fin de l’ère tertiaire et, au début du quaternaire (pleistocène), il s’est manifesté par la formation de la caldeira du Yirrigué sur le bord de laquelle l’actuel cône volcanique du Toussidé s’est constitué à une époque plus récente (Courbon, 2011).

La coulée de lave noire en direction de l’ouest, que l’on voit très bien sur l’image, correspond sans doute à l’une des toutes dernières manifestations volcaniques d’envergure du Tibesti.

Le Trou au natron : une formation spectaculaire et une ressource importante

Le massif abrite, au pied du cône volcanique, l’impressionnante cavité du Trou au natron, bien visible sur la photographie par la blancheur de la couche salée qui en recouvre le fond. D’un diamètre de cinq à six kilomètres, le Trou au natron a une profondeur qui varie entre 720 et 1 035 mètres, en fonction de la forme irrégulière de la lèvre rocheuse qui l’entoure à son sommet.

Ce cratère a sans doute été formé au quaternaire par plusieurs explosions magmato-phréatiques successives (vaporisation brutale de l’eau contenue dans une nappe phréatique au contact du magma). Trois petits cônes volcaniques se trouvent au fond du cratère. Celui-ci est remarquable par sa taille tout autant que par la couche de natron qui en tapisse le fond.  

Le natron est une ressource importante pour le Tibesti. Pour R. Capot-Rey, le natron – ou carbonate de soude – était recherché pour l’alimentation du bétail, le tannage des peaux et la préparation du tabac. Les anciens Egyptiens s’en servaient pour la préparation des momies. C. Baroin précise que le natron est indispensable à la prospérité des chameaux : « il les fait boire davantage, engraisser, et grâce à lui les chamelles ont plus de lait. Il ne satisfait pas seulement les besoins de ces animaux en sels minéraux, il les purge et les libère de parasites intestinaux ».

Non loin du Trou au natron se trouve un autre cratère d’explosion, moins large et d’une profondeur d’environ 450 mètres : le Doon Kinnimi (visible sur l’image au nord-est du Trou au natron). Le fond de ce gouffre ne comporte pas de natron (Courbon, 2011).

 

 



Les sommets de l’est : le Tarso Tieroko, l’Ehi Vey et le Tarso Toon


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A l’est de l’image se déploient plusieurs autres grands ensembles volcaniques, présentant parfois d’importantes calderas. On trouve en particulier du sud vers le nord : le Tarso Tieroko, d’une alttitude de 2 925 m, l’Ehi Vey, d’une altitude de 2 774 m., et enfin le Tarso Toon d’une altitude de 2 577 m.   

 

D’autres ressources

Sur le site Géoimage du CNES :

Bruno Lecoquierre : Algérie/Libye : le Tassili n’Ajjer et les deux oasis de Djanet et Ghat, entre patrimoine, tourisme international, frontières et djihadisme saharien

Bruno Lecoquierre : Algérie. Tamanrasset et le massif du Hoggar : un des grands massifs montagneux du Sahara

D’autres ressources

BAROIN C., 2003, Les Toubou, Editions vents de sable.

BRACHET J., SCHEELE J., 2015, « L’envers du tourisme au Sahara tchadien », Cahiers d’études africaines n° 217, Editions de l’EHESS.

CAPOT-REY, R., 1953, Le Sahara français, Presses universitaires de France.

COURBON P., 2011, Un gouffre volcanique exceptionnel : le Doon Kinnimi, Spelunca, 121.

LECOQUIERRE B., 2015, Le Sahara, un désert mondialisé, La Documentation photographique n° 8106, juillet-août 2015, La Documentation française, 64 p.

MONOD T., 1984, L’émeraude des Garamantes, Actes Sud, 1992.

Contributeurs

Bruno Lecoquierre, Professeur des Universités, Université du Havre – UMR IDEES (CNRS)