Toulouse, capitale française et européenne de l’aéronautique et de l’aérospatiale

Capitale de la nouvelle région Occitanie/Pyrénées-Méditerranée, Toulouse est la 4ème aire urbaine française derrière Paris, Lyon et Marseille avec 1,3 millions d’habitants, dont 470 000 pour la ville-centre. Son dynamisme démographique et économique d’un côté et son affirmation comme grande métropole de rang national, européen et mondial de l’autre sont largement fondés sur l’essor des activités de pointe aéronautiques et aérospatiales. En effet, celles-ci y organisent largement son système productif, bouleversent son organisation urbaine et assurent son attractivité, son rayonnement et sa renommée.

 

Légende de l'image

 

 

Cette image a été prise par le satellite Pléiades le 18/06/2018. Il s’agit d’une image en couleur naturelle, de résolution native à 0,70m, ré-échantillonnée à 0,5m. (Un clic droit sur l'image générale permet de la télécharger)

L'image ci-contre présente quelques repères géographiques de l'image satellite Pléiades du 21/02/2016

Contient des informations PLEIADES © CNES 2016 et 2018, Distribution Airbus DS, tous droits réservés. Usage commercial interdit.

 

 

 



 

Présentation de l'image globale

Toulouse : l’aérospatiale, un moteur essentiel dans l’affirmation métropolitaine

Cette image recouvre quasi intégralement l’unité urbaine de Toulouse ainsi que quelques communes de l’aire urbaine situées dans la couronne périurbaine. Avec ses 1,3 million d’habitants, cette agglomération occupe le 4ème rang dans la hiérarchie nationale. A la fin des années 1960, elle n’était classée qu’en 6ème position dans le classement national. Ces dix dernières années, elle est la métropole qui connaît la plus forte croissance démographique avec plus de 5.000 habitants supplémentaires par an.

De 1960 à aujourd’hui, son boom démographique, urbain et économique repose très largement sur l’essor des industries de haute technologie, tout particulièrement les activités aéronautiques et spatiales, largement portées par les politiques publiques nationales. 

Une industrialisation historiquement récente, une croissance du XXème siècle

Longtemps cantonnée, depuis la fin de l’Age d’or du pastel au XVIème siècle, dans une position de capitale régionale d’envergure limitée, la ville a connu un essor économique majeur au XXème siècle. En effet, malgré l’arrivée du chemin de fer en 1856, Toulouse n’a pas vraiment été touchée par les premiers signes de l’industrialisation croissante de la France au XIXème siècle, si ce n’est par l’industrie chimique d’armement en lien avec la poudrerie.

C’est donc à partir de la Première Guerre mondiale et du développement de l’industrie aéronautique mise à l’abri dans la profondeur du territoire national face à l’Allemagne que la ville va s’affirmer comme une métropole puissante. Elle devint alors une ville de pionniers, tels Pierre-Georges Latécoère. Originaire de Bigorre, ce dernier s’installe à Toulouse et, après une courte période de production de wagons, passe avec l’Etat un contrat pour la fabrication d’avions d’observation pendant la Grande Guerre.

L’aventure est lancée et dès la fin des années 1910, les « Lignes Latécoère » inaugurent l’épopée de l’aviation civile commerciale à partir de la piste de Montaudran (voir la localisation de l’Envol des Pionniers sur l’image globale). A partir de cette « piste des pionniers », Jean Mermoz réalisera le premier vol jusqu’à Dakar, Antoine de Saint-Exupéry survolera les Andes après la première traversée de l’Atlantique-Sud et la mise en relation de l’Afrique et de l’Amérique Latine. L’aéropostale vit ses heures de gloire.

Après la 2ème Guerre mondiale, Toulouse a accumulé un véritable savoir-faire dans le domaine aéronautique et la Caravelle - dont le vol inaugural a lieu en mai 1955 - est le premier appareil d’une longue lignée. L’Etat, dans sa volonté décentralisatrice et dans le cadre de la création des « métropoles d’équilibre », va faire de Toulouse la capitale française de l’aéronautique et de l’aérospatial avec l’installation par exemple de Supaéro et de l’ENAC.

L’aéroport de Toulouse-Blagnac, dont la construction a commencé en 1939, devient l’aéroport principal de la ville (voir la zone en hachures vertes sur l’image globale). Des pistes de cet aéroport s’élanceront les premiers modèles de chacun des grands projets aéronautiques français, puis européens, comme le Concorde en 1969, l’A300, le premier avion de la gamme Airbus, en 1972 ou l’A380 en 2005.
Les années 1960 voient également la naissance de l’industrie du spatial à Toulouse. Le Centre National d’Etudes Spatiales (CNES) est créé en 1961 à l’initiative de Charles de Gaulle. En 1968, les activités du centre de Brétigny sont transférées à Toulouse et si le siège principal du CNES reste parisien, le centre de Toulouse devient au fur et à mesure le site principal de l’agence avec 1.800 des 2.500 salariés (72 %).

Des activités de haute-technologie motrices

En 2014, suite à des rapprochements d’industriels, le groupe Airbus spécialise une de ses branches dans le spatial en créant Airbus Defense and Space (ADS). Le CNES et ADS sont localisés dans le technopôle du Sud-Est toulousain à Rangueil-Montaudran, à l’opposé de l’aéroport de Toulouse-Blagnac. Cette double localisation entre un pôle aéronautique au Nord-Ouest sur Blagnac-Colomiers-Saint-Martin-du-Touch (en vert sur l’image globale) et un pôle Sud-Est est une des particularités de la localisation des activités high-tech dans la métropole. Ceci rend d’ailleurs majeur les enjeux de déplacement quotidien entre les sites par le périphérique (voir le périphérique en pointillés noirs sur l’image globale).

Le pôle du Sud-Est se décompose lui-même en quatre entités distinctes : la zone technologique du Canal (en rose sur l’image globale) qui est en connexion directe avec l’Université des sciences de Toulouse III-Paul Sabatier, la zone de Labège-Innopôle qui jouxte celle de la Vallée de l’Hers (en orangé sur l’image globale) et l’Agrobiopole (en rouge sur l’image globale) plus au sud sur les communes d’Auzeville et de Castanet-Tolosan.

La métropole toulousaine accueille aujourd’hui 59 % des 146.000 emplois de la filière aéronautique nationale, qui génère actuellement la création de 3 .000 emplois par an sur l’agglomération toulousaine. 2/3 de l’emploi correspond à des emplois industriels, dont 50/000 pour la fabrication et 14.000 pour la métallurgie. Mais les fonctions abstraites de la production et les services périproductifs, en particulier l’ingénierie et les services informatiques, connaissent un vif essor, aussi bien dans les grands groupes donneurs d’ordre que dans les activités de sous-traitance.

En effet, dans le secteur, la sous-traitance représente la moitié des entreprises et près de 38.000 salariés, témoignant ainsi d’un système productif à la fois très hiérarchisé, très intégré et très diffus. Mais face à la saturation de l’espace métropolitain central toulousain, la filière aérospatiale se diffuse largement dans une partie de l’espace régional en s’appuyant sur certains pôles secondaires de la hiérarchie urbaine régionale.

Enfin forte de son succès, la métropole toulousaine affiche son engouement pour le secteur par la création de sites scientifiques à vocation pédagogique et touristique : pas moins de trois sites et musées sont consacrées à la valorisation de la filière aérospatiale et aéronautique (les 3 sont représentés par une étoile violette) : la Cité de l’Espace située à l’est de Toulouse, le Musée Aéroscopia situé à côté des pistes de Blagnac, et enfin l’Envol des Pionniers situé sur le site originel de l’aventure de l’Aéropostale à Montaudran.


 

Zoom d'étude

 

L’aéroport de Toulouse/Blagnac, un haut-lieu de l’aéronautique mondiale

 



Le site de Toulouse-Blagnac en 1990

L’aéroport de Toulouse-Blagnac est aujourd’hui le 5ème de France en termes de trafic. En excluant Roissy et Orly, il est le 3ème de province derrière ceux de Nice et de Lyon. Cet aéroport, s’il est une porte ouverte sur le monde pour l’agglomération toulousaine, est avant tout marqué par la présence des usines Airbus qui l’encadrent sur quasiment tout son périmètre avec ses quelques 26.000 employés, ses six sites et ses 700 hectares. L’aérogare commercial est indiqué en jaune sur l’image ci-contre.

En 1937, le gouvernement de Front Populaire nationalise les activités du groupe Dewoitine en raison de leurs liens nombreux avec l’industrie de l’armement et de leur caractère stratégique. La Société Nationale des Constructions Aéronautiques du Midi (SNCAM) implante un atelier d’assemblage sur la commune de Saint-Martin du Touch :
c’est la première implantation aéronautique dans le périmètre du futur aéroport de Blagnac.

Ce site va s’agrandir avec le choix de développer dans la partie Nord-Ouest de Toulouse un aéroport de taille nationale à vocation civile, alors que les premières pistes décidées en 1934 avaient servi principalement à des activités militaires pendant le 2ème conflit mondial. Avec le développement des usines Sud-Aviation, Bréguet ou Potez-Fouga, on assiste à l’émergence d’un véritable complexe aéronautique intégré où la piste commerciale est totalement intégré au développement du secteur aéronautique (Caravelle en 1955, Concorde en 1969, A300 en 1972…).

Cette image de 1990 a été faite par un satellite SPOT 2 qui avait une résolution de 20m, beaucoup moins précise que celle de l’image Pléiade de 2016. Cette image ne permet donc pas un niveau de zoom équivalent mais elle permet de se rendre compte de l’extension des activités aéronautiques dans l’agglomération toulousaine.


 



le site de Toulouse Blagnac aujourd’hui

Les deux images proposent une vue de la zone aéroportuaire de Blagnac entre 1990 et 2017. La croissance de l’industrie aéronautique y est bien visible. Les sites initiaux de la construction aéronautique se concentrent au sud des pistes de l’aéroport (la zone en bleu clair sur les 2 images).

La zone Aéroconstellation au nord du complexe apparait en limite bleue foncée et constitue le site de production le plus récent. En son sein, le hall Jean-Luc Lagardère, en pointillés bleus sur l’image, s’explique par le projet de l’A380 dont le gabarit hors du commun a nécessité l’aménagement de lieux d’assemblage gigantesques. Cette structure a été le plus grand projet industriel européen : 490 mètres de long, 250 mètres de large pour 46 mètres de haut.

Même si la compagnie européenne a annoncé en 2019 l’abandon de la fabrication de l’A380, son carnet de commande continue à se remplir (+ 747 en 2018) pour atteindre au total les 1.109 commandes d’avions de plus de 100 places). La croissance de l’industrie aéronautique se manifeste donc clairement par l’extension massive des structures industrielles aux abords de l’aéroport de Blagnac. En 30 ans, la superficie des infrastructures consacrées à la production d’avions a plus que doublé.
A proximité des nouvelles structures industrielles, la ZAC Andromède (en pointillés verts sur l’image) constitue également une vaste zone d’artificialisation récente entre l’image de 1986 et celle de 2017 : elle s’étend sur deux communes, Blagnac et Beauzelle, sur 210 hectares, dont 70 hectares d’espaces verts.

Situé face à Aéroconstellation, la ligne 1 du tramway le relie à Toulouse en quinze minutes, la place du Capitole se trouvant à moins de 15 km. Sur l’image, on note la présence du terminus de tramway (le rond rouge) qui amène au centre-ville de Toulouse. Témoin des dynamiques démographiques de l’aire urbaine toulousaine, ce quartier se compose de  25 % de logements individuels et de 75 % d’habitat  collectif. Le quartier compte également 21 % de logements sociaux et 10 % en accession sociale. A terme cet écoquartier doit accueillir 10.000 habitants ainsi que 200.000 m² de bureaux.


 

 



Le Parc du Canal : une vocation aéronautique et aérospatiale, un fonctionnement technopolitain

La bande rectiligne jaune sur l’image ci-contre indique la localisation de la première piste Latécoère, celle qui fut à l’origine de l’aventure de l’aéropostale. A proximité de ce quartier de Montaudran, le long du périphérique toulousain (ligne pointillée noire) prend place le technopôle de Rangueil (voir sur l’image globale les quatre entités le constituant). L’image ci-contre présente une des entités de ce technopole du Sud-Est, celle du Parc du Canal (limite en rosé sur l’image ci-contre).

Tout d’abord, la Faculté de sciences de Toulouse III-Paul Sabatier occupe une emprise spatiale importante sur l’image (en pointillés verts). Sa présence vient rappeler que Toulouse est un grand pôle universitaire. Le site compte également les facultés de médecine et de pharmacie dominées par la figure imposante du CHU de Rangueil (rond jaune). Cet ensemble universitaire  accueille depuis 1969 une grande partie des formations scientifiques de la métropole toulousaine, soit plus de 31 000 étudiants - le nombre le plus important d’étudiants pour une faculté toulousaine - et contribue largement à faire de la « ville rose » la 2ème métropole universitaire de France. 

A ces structures universitaires, il faut ajouter les Grandes Ecoles, elles aussi spécialisées dans les formations scientifiques, et les grands laboratoires de recherche. En particulier, l’INSA (rond vert), l’ISAE-SupAéro (pointillés rouges), l’ENAC – Ecole Nationale de l’Aviation Civile (pointillés roses), l’ONERA – Office National d’Etudes et de Recherches Aérospatiales (pointillés orangés) constituent autant de pôles d’excellence dans les formations scientifiques. Les laboratoires scientifiques sont également représentés (Observatoire de Midi-Pyrénées et CNRS, par exemple, en pointillés violets sur l’image).

Dans ce territoire de la haute-technologie, il convient de consacrer une place spécifique au site du Centre National d’Etudes Spatiales (CNES, en pointillés bleus sur l’image) qui depuis 1968 a été décentralisé à Toulouse. Avec plus de 1.700 salariés, ce site constitue le plus important de cette grande agence spatiale publique, la première en Europe. C’est le centre technique et opérationnel du CNES chargé du développement des grands programmes spatiaux de la responsabilité du CNES. Il assure en particulier la conception, le développement et la réalisation, en partenariat avec des entreprises et des loboratoires, d’équipements de niveau mondial ; la mise en orbite, le contrôle et l’exploitation des véhicules et des systèmes spatiaux, des satellites, sondes et ballons. Le CNES exerce à partir de Toulouse une délégation de maitrise d’ouvrage pour la Délégation Générale de l’Armement. Enfin, c’est un pôle au cœur d’un réseau de coopérations scientifiques et techniques internationales portant sur une quarantaine de projets spatiaux réalisés en collaboration avec une vingtaine de pays.       
    
Enfin, comme dans tout parc technopolitain, aux grandes structures d’Etat, aux établissements universitaires, aux grandes écoles, s’associent  des entreprises privées qui profitent des économies d’échelle et des synergies générées par ces clusters de haute-technologie (Spot Image, CLS Argos, Intespace…) : en particulier, Airbus possède deux sites liés à ces activités spatiales (Airbus Défense and Space) dont le plus important est représenté en hachures bleues foncées. Le groupe Thales Alenia Space est basé à quelques kilomètres de ce technopôle.

Ce technopôle présente une connexion incomplète avec le reste de la métropole toulousaine. Si deux stations de métro desservent le centre universitaire (faculté de pharmacie et Université Paul Sabatier), la connexion de la partie se situant à l’Est du Canal du Midi est moins efficace et les voies d’accès routières sont souvent saturées. Les stations de métro sont marquées par un rond rouge sur l’image ci-contre.

Autre point difficile à gérer, le relatif éloignement de ce technopôle avec la zone de Blagnac. En effet, la mise en relation entre le sud-est de l’agglomération et le nord-ouest se déroule pour le moment de manière quasi-exclusive par la route, via la rocade toulousaine, dont la congestion récurrente est une réalité de la vie toulousaine. La création d’une troisième ligne de métro programmée à l’horizon 2025 est une réponse partielle à ces enjeux puisque longue de 27 km, elle rejoindra le nord-ouest de l’agglomération avec le sud-est. Elle desservira selon les études 70 % des zones d’emploi de la métropole et portera un nom résumant à lui seul tous les enjeux de connexion vus précédemment : Toulouse Aerospace Express.


 

 

 

Aéronautique et aérospatial : une dimension touristique affirmée

 



La Cité de l’Espace

Sur l’image globale, trois sites principaux liés à l’aéronautique et à l’aérospatiale ont été signalés comme des hauts lieux de l’activité touristique toulousaine. A l’est de l’agglomération, le long du périphérique, s’élève la Cité de l’Espace ouverture en 1997. Au nord-ouest, à proximité des pistes de l’aéroport de Blagnac, se trouve le musée Aeroscopia, inauguré en 2015. Et, enfin, au sud-est, sur les pistes de Montaudran a été installé le bâtiment de l’Envol des Pionniers, inauguré en 2018.

Ces trois bâtiments démontrent la volonté des collectivités locales de faire des domaines de l’aéronautique et de l’aérospatiale, une image de marque de la région toulousaine : espace, aéropostale, aéronautique sont au cœur de ces projets. La Cité de l’Espace a battu ces dernières années ses records de fréquentation avec presque 400 000 visiteurs en 2018. La maquette à l’échelle 1 du lanceur Ariane 5 qui trône le long de la rocade toulousaine constitue d’ailleurs un repère majeur à la fois pour les locaux et les touristes. Sur l’image ci-contre, cette maquette se repère à l’ombre qu’elle projette sur le sol.

 



Le musée Aéroscopia :

Le musée Aeroscopia associe véritablement industrie et tourisme puisqu’il se situe dans la zone Aéroconstellation dédiée au départ à l’assemblage des A380. Spectaculaire par ses dimensions, ce musée offre l’opportunité aux visiteurs de voir des exemplaires des avions ayant marqué l’histoire de l’aéronautique (A300 ou Concorde, visible sur l’image). Il a accueilli 180 000 visiteurs en 2018.

 

 

 

Contributeur

Vincent Doumerc, professeur agrégé de géographie, Lycées Saint-Sernin et Fermat (Toulouse)